Je sais qu’il y a des belles-mères en colère qui lisent mon contenu.
La plupart me suivent puis se désabonnent, parce que mon ton leur semble trop mièvre, trop idéalisé, trop « bisounours ».
Et je le comprends.
Parce que de leur côté, elles vivent injustices sur frustrations, traînées dans la boue, ignorées comme des plantes vertes, rejetées comme des intruses.
Et quand on se sent attaquée dans son intégrité, la colère devient une arme précieuse pour riposter.
Parce que la colère est saine : elle défend.
La colère anime, et ne pas la ressentir, c’est n’être que vulnérabilité.
Ne pas la ressentir, c’est se diluer dans une dépendance au monde extérieur, parce que l’intérieur n’est pas assez incarné pour servir de boussole, celle qui dit :
« On est en train de piétiner mon respect de moi-même, et ça n’est pas acceptable. »
Ne pas la ressentir, c’est ne pas naître.
Les plus grandes transformations sociales ont été permises par la colère, car la colère érige, brandit, affirme contre l’oppression.
Mais la colère, si elle est saine, ne demeure qu’une étape vers la guérison.
Rester trop longtemps dans cet état empêche le travail d’acceptation de l’impuissance : celui qui consiste à accueillir ce qui ne peut être changé.
Ce passage s’accompagne nécessairement d’une tristesse constructive, celle qui ne détruit pas mais qui parle de la déception, disant :
« Tu ne peux pas tout régler, et ce n’est pas une faiblesse que de l’accepter. C’est de la sagesse. »
Quand cette tristesse est traversée, un autre mécanisme psychique peut s’exprimer : la sublimation.
La sublimation, c’est l’art de transformer le négatif brut en positif travaillé.
C’est, par exemple, transformer une colère ressentie en défense d’une cause, en expression artistique ou… en écriture de réflexion.
Mais si la colère devient le seul outil de sa boîte, elle finit par nous user.
Elle assèche, elle tourmente, elle nous fait oublier qu’on existe autrement que dans le combat.
Et à la fin de la journée, c’est comme si elle venait gratter la plaie qui, naturellement, voudrait cicatriser.
La colère est saine, elle défend.
Mais elle n’est qu’un passage vers l’acceptation et la reconstruction dans l’amour.
Parce que c’est l’amour qui guérit.
L’amour de soi d’abord : par les limites qu’on pose, la fierté qu’on éprouve, la tendresse qu’on s’insuffle.
Et quand cet amour est bien ancré, il devient une ressource magique pour accueillir ce qui ne peut être changé, et aller vers l’autre pour soigner par le lien.
Si la colère est le portail, la tristesse en est le seuil, et l’amour la structure qui permet l’élévation.
Alors, plutôt qu’un « bisounours », je préfère être une fileuse :
celle qui, là où règne l’éclatement, œuvre pour rassembler.
Celle qui montre la voie pour achever la belle-matrescence.